Des Navires et des Hommes, partie 1

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Avec la sortie récente de Deepwater Horizon, je voulais consacrer un dossier traitant d’un genre de films en voie d’extinction : le film d’aventures maritimes. 

La plupart du temps inspiré d’une histoire vraie, relatant le courage et l’abnégation d’hommes et/ou parfois de femmes ayant défiés les éléments, les gouvernements ou, à moindre grande échelle, leur société, ces films marquent une page dans l’Histoire.

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Anonymes ou oubliés mais dont les récits racontent véritablement que l’héroïsme n’a pas nécessairement besoin d’être représenté sous la forme d’adaptations de comic books, ce genre du film d’aventures parle de courage, d’humanité, de sacrifice mais semblent ne plus être assez populaires pour plaire actuellement.

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Sans parler de rythme lent ou de films old school (les 4 films traités ont tous moins de 3 ans), les récits épiques mais ancrés dans un contexte naturaliste et réaliste obligent le spectateur lambda à l’identification envers des personnages profondément humains et traités, filmés, joués comme tels.


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Pas de second degré ou de blagounettes bienvenues pour détendre l’atmosphère, pas de rythme clippesque dans les séquences d’action, parfois peu nombreuses mais redoutablement efficaces quand elles surviennent.

Et enfin le plus « embarrassant » pour le spectateur : l’empathie et l’émotion envers des portraits d’hommes qui ont certes existé, qu’ils soient idéalisés ou romancés, mais qui sont désespérément humains dans leur représentation.

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Un film comme En pleine tempête de Wolfgang Petersen marquait la fin d’une époque, film d’aventures marines « ultime » pouvant rivaliser en termes d’émotion et de spectaculaire avec l’insubmersible Titanic sorti 3 ans plus tôt.

Le second exemple est Au coeur de l’Océan de Ron Howard, sorti il y a presque 1 an, qui, repoussé et surestimé par son studio, s’est vu livrer en pâture face au mastodonte que représentait le retour de Star Wars.

Ervin Maske (john Magaro), Andy Fitzgerald (Kyle Gallner), Richard Livesey (Ben Foster) and Bernie Webber (Chris Pine) are the brave men who set off on the most daring rescue misson in the history of the Coast Guard in Disney's heroic action-thriller THE FINEST HOURS, presented in Digital 3D (TM) and IMAX (c) 3D.

Plus que n’importe quel monstre ou menace venue des méandres du fantastique, l’Océan reste un véritable personnage cinématographique à exploiter car il peut être abordé de 1001 façons et ce peu importe le genre ou l’époque où se passe le film.

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Et malgré la lassitude pour un récit d’aventures classique se passant sur la mer, les films d’aventures maritimes vous font passer par différentes émotions durant l’espace de deux heures ou plus.  

The Finest Hours : le courage au-delà des flots

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Le premier film de ce dossier est sorti en 2016, réalisé par Craig Gillespie (le remake de Fright Night ). The Finest Hours raconte l’histoire vraie durant l’hiver 1952 au Massachussetts  du naufrage de deux pétroliers dont le SS Pendleton qui a été carrément coupé en deux lors d’une tempête, laissant une partie de son équipage dériver en plein océan, en attendant la venue des secours avant que le (demi) navire ne coule.

Based on the extraordinary true story of the most daring rescue in the history of the Coast Guard, Disney's THE FINEST HOURS storms into theaters in Digital 3D (TM) and IMAX (c) 3D.

Bernie Webber est un jeune officier des gardes-côtes sur le point de se marier qui a pris la décision, malgré les ordres de son supérieur, d’entreprendre l’impossible et, avec un groupe d’hommes, de défier la tempête pour sauver les membres de l’équipage.

Chris PIne (right) is Bernie Webber and Beau Knapp is Mel Gouthro in Disney's THE FINEST HOURS. ©Disney Enterprises. CR: Claire Folger.

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Quand je parlais de portraits d’hommes plus haut, le film The Finest Hours est un premier exemple tout à fait représentatif du genre.

En effet, l’élément déclencheur que représente la tempête et la cassure du SS Pendleton en deux parties n’est que secondaire dans l’histoire, car le réalisateur s’intéresse avant tout à présenter ces personnages bien avant que les événements ne commencent.

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Il peut être très surprenant pour un film censé parler de navires échoués et de sauvetage en pleine tempête de commencer par une séquence aussi calme que celle de deux hommes discutant dans une voiture dans un paysage enneigé, se préparant à un rendez-vous amoureux.

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Plus que le récit d’aventures promis, le film raconte avant tout le portrait idéalisé de Bernie Webber, et ses interactions avec les autres gardes-côtes, mais également avec les habitants de la ville.

De l’autre côté, on suit l’équipage du Pendleton qui essaye de survivre par tous les moyens possibles en empêchant le navire de sombrer et qui essaye de trouver, dans la même dynamique, un moyen de se rapprocher le plus possible des côtes pour être plus facilement retrouvés et évacués.

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Les scènes se passant sur le demi-Pendleton sont parmi les plus nerveuses et les plus réussies du film, elles s’opposent nettement au calme et à l’immobilisme des séquences à terre. Néanmoins, leurs enjeux ne sont jamais bâclés.

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On comprend clairement qu’un trauma hante encore Webber, et les réactions envers lui vues à travers les yeux de sa fiancée sont là pour souligner le poids des responsabilités de cet homme, créant ainsi une sorte d’empathie mortifère sur les motivations du personnage mais aussi sur ses véritables chances de succès face à la fureur des éléments.

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Tout le film est construit pour jongler entre l’intimisme des relations : celles de Webber amoureux, celles des autres gardes-côtes, celles des hommes de l’équipage envers Sybert…

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Et une menace sourde mais visuellement omniprésente représentée à la fois par les chutes de neige qui recouvrent le décor à chaque instant, et la fureur de la tempête rendue presque mythique à travers des dialogues désespérés sur l’importance des fonds marins et les bancs de sable, illustrée à l’écran par une séquence de bravoure totalement déconcertante.

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Sur le seul aspect cinématographique, la mise en scène de Gillespie oscille entre le très bon et le moyen, faisant dériver le rythme de son film de façon hasardeuse.

Le rythme est certes lent et le cadre parfois statique, il n’en reste pas moins intéressant dans ce qu’il raconte.

Cependant, pour des séquences plus énergiques comme celles du navire en perdition, le rythme est là aussi en dents de scie : entre un superbe plan-séquence filmé en steadycam à travers les coursives ou des mouvements de caméras spectaculaires, très inspirés dans leur découpage (comme ce plan de grue montrant le naufrage du Fort Mercer depuis le point de vue d’un homme qui découvre que son navire vient de se couper en deux moitiés) et des phases d’accalmie peu convaincantes.

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Et à l’opposé, des plans à hauteur d’homme en champ-contre-champ, certains plus nerveux que d’autres mais dans l’ensemble terriblement « bateau ».

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Le casting est lui aussi très bon à commencer par Chris Pine et le pas assez connu Casey Affleck (frère de Ben), mais aussi les excellents Eric Bana, Ben Foster ou échappé du Hobbit, la sympathique trogne burinée de Graham « Dwalin » MacTavish.

Dans la droite lignée d’En Pleine Tempête, The Finest Hours reste un divertissement de haute volée malgré des gros soucis de rythme et un script parfois trop paresseux au vu de son sujet.

ADMIRAL: MICHIEL DE RUYTER : la famille avant le roi

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Sortie cette fois-ci en 2015, cette super-production néérlando-belge est une vraie découverte passée sous silence depuis plus d’un an.

En plus du fait qu’une grande partie du casting est flamande et hollandaise, le film a comme guest stars l’acteur fétiche des débuts de Paul Verhoeven, Rutger Hauer, mais aussi Charles Dance, acteur ayant le vent en poupe depuis la série Game of Thrones.

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Les plus cinéphiles d’entre vous le connaissent sans doute déjà via le génial Last Action Hero, le maudit mais fabuleux Alien 3 ou le nanardesque Golden Child avec Eddie Murphy.

N’importe quelle autre production utiliserait ses guest stars (sur l’affiche, c’est le cas) ; pourtant, le film se permet de faire pire que les caméos d’Astérix aux Jeux Olympiques : faire participer Rutger Hauer dans une séquence d’introduction où il apparaît très exactement 2 plans.  

Rutger Hauer sur la droite. avec les cheveux longs. Encore 2 plans et il a fini sa journée.
Rutger Hauer sur la droite, avec les cheveux longs. Encore 2 plans et il a fini sa journée.

Il est assez difficile de parler du contexte historique du film qui met en scène des batailles entre la Hollande et l’Angleterre. Michel de Ruyter, amiral de la flotte et héros national, aux côtés des frères de Witt, se voit confier par le prince d’Orange l’armada royale afin de stopper la flotte britannique mais aussi l’invasion imminente des Français. Cette décision est assez controversée au vu des liens familiaux entre les deux pays.

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Michel De Ruyter accepte sans se douter qu’il ne reverra sans doute plus ni sa famille ni la terre ferme et, qu’à son insu, il servira d’instrument politique pour les représentants de la royauté.

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Si on prend le film tel qu’il est, Michiel de Ruyter est un film d’aventures historiques et politiques absolument passionnant.

Portraits de personnages plus ambigus et comploteurs les uns que les autres, dont les actes et décisions vont faire virer de bord le ton du film pour devenir un drame historique sanglant et complexe.

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Le film montre en effet des batailles navales et suit les actions de De Ruyter et son équipage en première moitié de film.

Puis, au fil de la narration, les événements vont finir par totalement basculer dans la seconde moitié et se passer principalement à terre.

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Comme vous pouvez le voir, le fonds est riche et passionnant, permettant de découvrir une page de l’Histoire d’un pays qu’on ne connaît pas forcément.  

Mais malheureusement la forme pose un véritable problème au film, en le plombant vers le bas.

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Tout comme The Finest Hours, la mise en scène oscille entre le très bon, le sublime même parfois, et le médiocre.

Pour la mise en images d’abordages des navires (superbement agencés, soit dit en passant), la mise en place des batailles en vue aérienne évoque plus un jeu vidéo de stratégie.

Le concept est certes novateur et intéressant, mais cette alternance des points de vue est utilisée plus d’une dizaine de fois durant le film et dont certaines cinématiques… je voulais dire séquences de présentations des flottes ! ne dépassent pas les 6 secondes.

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PRESS START!

Le film offre néanmoins une superbe reconstitution historique des décors au sol, mais qui sont filmés et éclairés pour certaines séquences à la manière d’un téléfilm France Télévisions ou d’un clip de Mylène Farmer (principalement les séquences de dîner de la royauté).

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À l’autre bout, vous avez des plans à la photographie sublime (superbe contre-jour lors de l’arrivée au port, plans nocturnes éclairés par un filtre rouge sang), et deux saillies de violence montrées hors écran certes, mais qui ne rivalisant à aucun moment avec le talent d’un Paul Verhoeven.

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Malgré des soucis en termes de cadres et de mises en scène, parfois de jeu d’acteurs/trices, Admiral: Michiel de Ruyter est une découverte pour toute personne friande d’Histoire et d’aventures, et est une excellente alternative à ceux en manquent de films d’aventures.

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Philippe Orlandini

Chroniqueur cinéma, séries et actu geek en général. On me dit le sosie de quentin tarantino et de voldemort.