Don’t Starve, une perle de profondeur

 Les jeux de survie sont en vogue ces derniers temps, surfant pour beaucoup sur une vague vertueuse lancée par Minecraft , comme si ce titre au gameplay ultra-innovant ouvrait de nouvelles perspectives aux développeurs. Ainsi, les jeux les plus récents intègrent des éléments de survie à leur gameplay (à la rentrée 2013, les Lyonnais de Mi-Clos ont sorti sur iOS l’ovni Out There , un jeu de survie aux confins de l’espace). C’est dire si la survie donne des idées aux développeurs. Dernièrement, le genre a profité d’un excellent coup de pub avec la sortie sur PS4 de Don’t Starve, développé par Klei Entertainment. À ce moment, le jeu était sorti depuis près d’un an sur PC et bénéficiait d’un succès d’estime. Sa sortie sur la console de Sony (et accessoirement sa gratuité pour les abonnés PSN) l’a révélé au grand public, lui permettant d’atteindre en peu de temps la barre du million de téléchargements.

 Le principe du jeu est simple : survivre le plus longtemps possible. Le joueur est propulsé dans un monde généré aléatoirement en 2D isométrique, avec une identité visuelle qui fait immanquablement penser aux univers torturés de Tim Burton. On y croise toutes sortes de créatures, du lapin inoffensif (et peureux) à l’araignée géante, en passant par des cyclopes passablement colériques et dévastateurs.

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Trois jauges permettent au joueur de savoir où il en est : une pour sa vie, une autre pour son niveau de faim et la dernière… pour sa santé mentale. Si l’une des deux premières se vide, la partie est terminée. La troisième, quant à elle, plonge le personnage dans la folie au fur et à mesure qu’elle s’épuise, et apporte ainsi son lot de nouvelles créatures spectrales et mal intentionnées, qui, bien que n’existant que dans la tête du personnage, lui causeront un tort effectif. Le jeu intègre également une gestion des saisons qui influence fortement le gameplay, que ce soit au niveau des créatures que l’on croise ou simplement de l’état du personnage. L’hiver et son froid mordant risquent par exemple de réduire à néant la santé fragile de notre pauvre avatar. Il existe naturellement de multiples moyens de ne pas en arriver là, et le monde hostile dans lequel le joueur est plongé va paradoxalement lui fournir les moyens de sa survie.

 En effet, c’est là qu’est toute la richesse du jeu : que ce soit en fabriquant une machine à science donnant l’accès à un tas d’outils forts utiles, ou encore en apprivoisant un cochon bipède pour qu’il attaque vos ennemis, le monde dans lequel on évolue offre un panel d’actions très étoffé. Ajoutez à cela la possibilité de créer des passerelles vers d’autres mondes, des amulettes de vie, et vous comprendrez que la durée de vie du titre est excellente. Au fil de la partie, Don’t Starve dévoile une profondeur impressionnante, et on se prend à explorer la carte à la recherche d’un autel de résurrection (qui, une fois reconstitué, vous offre une deuxième chance en cas de pépin), à collecter frénétiquement les ressources pour remplir nos coffres, le tout pendant des heures.

C’est d’ailleurs souvent à ce moment-là que survient la mort, quand, trop en confiance parce qu’il a survécu une cinquantaine de jours, le joueur va tenter des actions un peu risquées (comme en venir aux mains avec une demi-douzaine d’araignées pour récupérer un bout de toile). Et la mort dans Don’t Starve est irréversible. Elle est même franchement cruelle, car le joueur est obligé de repartir de zéro, perdant tous ses outils, ses constructions, bref, tout ce que ses mains frêles ont péniblement assemblé pour survivre. Ne reste qu’à recommencer au jour premier et patiemment recréer tout ce qu’on a perdu – à moins bien sûr d’avoir reconstitué un autel de résurrection avant de passer l’arme à gauche.

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Cet aspect délicieusement hardcore n’est cependant pas sans défaut, car le gameplay implique fondamentalement une certaine répétitivité. Ce n’est pas un mal en soi, puisqu’un jeu de survie implique forcément des mécaniques répétitives, des processus qui fonctionneront à chaque fois et permettront de s’assurer de passer les premiers jours. Mais Don’t Starve rend la moindre erreur potentiellement fatale, ce qui risque de représenter une expérience usante sur le long terme pour la plupart des joueurs.

Reste que dans l’ensemble, le soft est sûrement la perle de l’année 2013 et a immanquablement une belle carrière devant lui (les développeurs parlent de le sortir sur PSVita), d’autant que la sortie prochaine du DLC Reign of Giants devrait redonner un coup de fouet à sa durée de vie déjà considérable. Ce qui fait sa force, c’est que derrière des contours simplistes, Don’t Starve révèle un gameplay aux petits oignons, un contenu d’une largeur et d’une variété épatantes. Bref, de quoi tuer plusieurs dizaines d’heures de votre vie, ce qui après tout est la définition même du mot jeu.