Entretien avec Zit Zitoon

Artiste lyonnais au style épuré et percutant, Zit Zitoon expose en ce moment au restaurant le Crock’n’Roll (1 Rue Désirée, 1er adt). Retour sur l’univers de cet artiste touche à tout.

Tout d’abord, peux-tu te présenter à nos lecteurs ? Y-a-t-il un message ou une signification derrière ton nom ?

Bonjour à tous. Donc je m’appelle Zit Zitoon et je suis graphiste et artiste indépendant. Je signe avec ce pseudonyme depuis que j’ai commencé à dessiner il y a un peu plus de 15 ans. Mon vrai nom est Olivier et Zit Zitoon signifie huile d’olive en arabe. C’est un ami d’origine algérienne qui m’appelait comme ça au collège. Du coup mes autres amis ont suivi et ça s’est imposé tout naturellement quand il a fallu que je me trouve un nom d’artiste.

Aujourd’hui, autour de moi, il n’y a quasiment plus personne qui m’appelle par mon vrai nom. Je compte faire quelques changements sur ma carte d’identité dans peu de temps (sourire)

Quelles sont les différentes techniques que tu utilises pour la réalisation de tes œuvres ? Et pourquoi cette/ces techniques plus particulièrement ?

Je mets en avant le message dans chacune de mes œuvres donc la majorité de mes créations sont volontairement très épurées : En noir et blanc avec une touche de rouge pour un impact visuel immédiat. C’est ce qui caractérise mon style graphique.

Pour cette exposition, j’ai essentiellement travaillé sur ordinateur avec le logiciel Illustrator qui permet de reproduire ses créations en vectoriel et de les étirer au format voulu sans perte de qualité.

Comme je m’inspire beaucoup de la culture du logotype, c’est une technique qui me correspond très bien. Je scanne mes illustrations faites à la main et je les retouche via lIllustrator avant de les imprimer.

Je réalise également des illustrations à la main directement sur toile ou sur papier d’art à l’encre de chine. Je fais aussi du pochoir et du collage d’affiche de temps à autre.

As-tu des matériaux de prédilection ?

Les feutres (type posca), l’encre de chine, la bombe et les logiciels de création visuelle.

As-tu reçu un enseignement artistique particulier ?

Oui. J’ai fait cinq ans d’études dans le domaine de la communication visuelle et des arts appliqués et par la suite j’ai travaillé en agence de communication visuelle avant de me lancer en indépendant.

Comment définis-tu ton art et ta manière de travailler ? Penses-tu appartenir à un courant artistique précis?

Je ne pense pas appartenir à un courant artistique particulier. Mais je fais partie de cette génération d’artistes qui a baigné dans l’informatique, l’art de rue et la culture hip-hop. Ça se ressent dans ce que je fais. Pour préciser mes influences, elle vont de l’art nouveau au street art en passant par la publicité. Tout particulièrement les vieilles pubs du milieu du XXème siècle avec des typographies tape-à l’œil et ce côté kitsch que j’aime beaucoup. Celles qu’on peignait sur les murs des maisons par exemple.

Quelle(s) ambition(s) transmets-tu au travers de tes œuvres ? Politique, philosophique, purement esthétique ?

Il n’y a pas d’ambition politique dans ce que je fais même si certaines de mes toiles représentent des figures politiques emblématiques comme Gandhi ou Martin Luther King.C’est surtout leur philosophie de vie qui m’a marqué. Donc je pense que l’ambition que je cherche à transmettre est surtout philosophique. Je suis pour une révolution où chacun chercherait à se changer soit même avant de vouloir changer les autres.

Tout tourne autour de la planète et de l’être humain dans chacune de mes toiles. L’idée, c’est d’exprimer mon ressenti face à l’humanité. A la fois avec humour et gravité. Et de manière esthétique, bien sûr.

Le titre de l’exposition, c’est : Love Your World .

Gandhi disait : « Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde ». Je pense que ça résume bien mon idée.

J’ai pu voir que dans une de tes œuvres (Le sheitan est un fumeur de gitanes), il y avait l’image de Gainsbourg rappelant sa chanson Dieu est un fumeur de Havanes. Si mon rapprochement est correct, comment trouves-tu inspiration ?

Oui, c’est ça. Encore une fois, je m’inspire beaucoup de personnages célèbres dont je partage la philosophie de vie et/ou qui me fascinent. L’idée m’est venue quand j’ai écouté le morceau de Gainsbourg. Je me suis dit « Si Dieu est un fumeur de Havanes alors forcément le diable fume des clopes dégueulasses ». Le tout s’accordait en rimes dans ma tête donc c’était parfait.

Et pour aller plus loin, quand tu vois la vie que menait Gainsbourg, grand consommateur de Gitanes, à la fin de sa carrière… c’était vraiment une vie de luxure et de débauche comparable à celle d’un diable. Donc il y a un double sens volontaire et tu peux retrouver ça dans plusieurs de mes toiles. Je réfléchis toujours beaucoup au(x) message(s) que je veux faire passer avant la création pure.

Y a t-il des artistes que tu aimes ou admires plus particulièrement ?

Il y en a beaucoup et il ne sont pas forcément tous très connus. En Street Art, il y a bien évidemment Banksy qui m’a marqué ou encore Obey. En France, j’apprécie beaucoup le travail de Grems, lui-même fortement influencé par Keith Haring Sinon, en Art Nouveau, des artistes comme Mucha et Toulouse-Lautrec sans hésitation.

J’ai pu voir que tu avais ta page sur Kisskissbankbank, peux tu m’en dire d’avantage ? Cette démarche t’a t-elle aidé à exposer ou à avoir des commandes ?

Oui, en fait j’ai créé ce Kisskissbankbank car j’avais besoin d’une aide financière afin de reproduire sur toile l’entièreté de mes graphismes en vectoriel. Donc il est très important de préciser que c’est grâce à toutes les personnes qui ont cru en ce projet, parmi lesquels mes amis et ma famille, que cette exposition a pu voir le jour.

Symboliquement, c’est génial surtout par rapport au message de l’exposition.

Je n’ai eu jusqu’ici que des retours positifs sur l’ensemble de mes toiles. Le bouche à oreille a opéré et j’ai eu des propositions pour exposer ailleurs ainsi que quelques commandes. Mais ce qui me booste tout particulièrement, ce sont les encouragements et les félicitations que j’ai pu recevoir. C’est ce qui me permet d’avancer.

J’ai également vu que tu faisais de peu musique ? y a t-il un lien entre les deux arts que tu pratiques ?

Je suis également slammeur et rappeur sur Lyon depuis plusieurs années. Je fréquente le milieu du slam lyonnais depuis bientôt 5 ans et j’écris depuis plus de 10 ans. J’ai déjà réalisé quelques clips musicaux qui tournent sur internet.

Sinon oui, il y a un lien entre ces deux arts et cela peut se voir dans mon exposition. Sur plusieurs de mes toiles, il y a des petites phrases poétiques de ma création, souvent issues de mes textes.

Il m’est d’ailleurs arrivé plusieurs fois de composer une toile en partant d’une de ces phrases. Donc je ne me vois pas abandonner un de ces arts au profit de l’autre. Je me sens entier en les pratiquant tous les deux. Et je réfléchis d’ailleurs à une future exposition ou le graphisme et l’écriture seraient totalement liés.