Imágenes : retour sur les vingt ans du Ballet Flamenco de Andalucía à la Maison de la Danse
Imagenes, retour sur les vingt ans du Ballet Flamenco de Andalucía à la Maison de la Danse - Flamenco

Jusqu’au 5 décembre, le Ballet Flamenco de Andalucía, dirigé par Rafaela Carrasco, présente le spectacle Imágenes à la Maison de la Danse, une forme d’hommage aux vingt ans qu’a passé la compagnie à représenter la culture flamenco dans le monde entier.

Rafaela Carrasco est la directrice du Ballet Flamenco de Andalucía depuis deux ans. Cette institution installée à Séville, au cœur de l’Andalousie, assume un rôle d’ambassadeur de la culture flamenco depuis sa création en 1994. Rafaela Carrasco y a étudié dès l’age de 18 ans, avant d’entamer sa carrière professionnelle à l’Andalusian Dance Compagny. Plus tard, elle fonde sa propre compagnie à Madrid. En 2013, elle est choisie pour prendre la tête du Ballet Flamenco de Andalucía où elle crée et enseigne aux côtés de David Coria, Eva Morales et Hugo López.

Avec leur corps de ballet, ils sont aujourd’hui considérés comme les meilleurs représentants du cante jondo (chant profond), qui désigne la forme la plus pure de l’art ancestral du flamenco, par opposition au cante chico, plus festif. Selon le journaliste espagnol Ángel Álvaro Caballero, le chanteur y laisse dans chaque vers « un peu de son âme ». Il est à noter que le cante jondo n’est qu’une des nombreuses formes du flamenco, chacune disputant aux autres une part de l’héritage de cet art aux origines multiples.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, à voir la danseuse au centre de la scène dans sa robe aux couleurs vives, le chant, au même titre que la guitare, constitue un des piliers de l’art flamenco. Ce soir, Antonio Campos et Antonio Nuñez « El Pulga » entonnent leurs chants déchirants accompagnés des cordes de Jesús Torres et Juan Antonio Suárez « Cano ». Ensembles, ils répondent à la présence des danseurs par des rythmes entêtants et complexes, claquements de mains et cris d’encouragements.

crédits : Maison de la Danse
crédits : Maison de la Danse

L’entrée sur scène de Rafaela Carrasco impose d’emblée le caractère martial et fier du flamenco. La tête droite et le corps tendu, ses mains dessinant de douces arabesques, elle fait claquer ses talons à un rythme d’abord lent puis soutenu, comme pour annoncer la tempête à venir.

Rejointe par les trois autres solistes et le corps de ballet, ils exécutent cinq tableaux, chacun dédié à un ancien directeur du Ballet Flamenco de Andalucía. Sont présents des éléments d’anciennes chorégraphies du Ballet, mais le spectacle se conçoit pas comme une reprise, plutôt comme un hommage au chemin effectué depuis vingt par l’institution.

Aux formes traditionnelles de l’art flamenco s’ajoutent des éléments contemporains. Les accessoires ne se limitent pas aux châles mais incluent des tabourets et plus étonnamment, des valises. Les éclairages sont élaborés et intelligemment faits. Ils mettent en valeur la communion qui se crée entre les danseurs et les musiciens. On retrouve ici le caractère absolument pictural du flamenco, célébré dans les toiles de Caravage ou de Jérôme Bosch. Par contre, on trouvera aux images projetées en fond de scène un caractère superfétatoire.

crédits : hoyesarte.com
crédits : hoyesarte.com

Dans ce cadre, les danseurs expriment des sentiments immémoriaux : joie, peine, douleur, amour et frustration, tout ce qui se joua dans les fêtes et la vie gitane de l’Andalousie des quatre derniers siècles est présent de façon extrêmement concrète sur scène, ce soir. Jouant alternativement la fierté guerrière et la mélancolie toute méditerranéenne, ils progressent en intensité et la tension reste constante, jusqu’à la fin. Il est difficile de ne pas retenir son souffle quand les corps et les regards se croisent, faisant fi du contact physique pour n’exprimer qu’une passion éthérée et pourtant si frappante.

Plus que spectateurs, nous somme témoins ; car sur scène, c’est une certaine vision de la vie qui se danse, se chante et se joue.

Imágenes, du Ballet Flamenco de Andalucía, à la Maison de la Danse jusqu’au 5 décembre.