Ma Vie de Courgette : un film, une expo !
Courgette

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Petit dernier de la sélection des dessins animés de Cannes à paraître sur nos écrans, Ma Vie de Courgette est un dessin animé tendre et réflexif sur l’enfance.

L’histoire de Courgette naît de la collaboration du réalisateur de films d’animation Claude Barras, dont c’est le premier long métrage, et de la scénariste Céline Sciamma. Tous les films de cette dernière (La Naissance des Pieuvres, Tomboy…) traitent des tourments de la jeunesse, de la recherche de soi, du rapport à l’autre. Leur collaboration donne naissance à un film intelligent et sensible, qui grandit avec nous, et qui touche petits et grands sans distinction.

Vous avez dit Courgette ?

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Ma Vie de Courgette, c’est l’histoire d’Icare, petit bonhomme lunaire qui fabrique des cerfs-volants à l’effigie de son père parti avec une autre femme. La mère d’Icare est alcoolique et le film suggère qu’elle a envers son fils des comportements violents. Un jour qu’elle entre dans l’une de ses crises d’hystérie, Icare, qu’elle surnomme Courgette, rabat la trappe de sa petite chambre sur cette dernière et la tue sans le vouloir. On ne dirait pas comme ça, mais c’est pourtant le début d’une belle histoire.

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C’est le gentil inspecteur de police, Raymond, qui conduira Courgette au centre pour enfants où le petit garçon va reprendre vie. D’abord timide et effacé auprès des autres, Courgette finit par s’intégrer à la joyeuse bande qui, comme lui, a subi la cruauté des adultes. Comme le lui dira Simon, le gros dur de la bande, « on a plus personne pour nous aimer », et c’est ensemble et avec l’aide d’adultes bienveillants (la directrice et la maîtresse qui font office de mère de substitution) que les enfants vont réapprendre à s’aimer et à faire confiance à ceux qui les entourent.

Mais évidemment tout finit bien pour Courgette qui tombe amoureux de la jolie Camille et finit même par être adopté par Raymond, le policier au cœur tendre, qui se prend d’affection pour le jeune garçon.

La violence à hauteur d’enfant

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Ce qui frappe lorsque l’on voit Ma Vie de Courgette pour la première fois, c’est à quel point le scénario n’édulcore pas la violence faite aux enfants. Si l’histoire est en apparence tendre et simple, c’est parce que le film obéit à un principe de transmission pédagogique. Si les enfants ne saisiront probablement pas le sens du sous-texte plus sombre de l’histoire, le dessin animé donne aux adultes les clés pour en parler.

La première scène du film est extrêmement frappante, il est rare de voir au cinéma un enfant tuer sa mère après quelques minutes de film. Et si dans Le Petit Fugitif de Morris Engels on fait croire au jeune Joey qu’il a tué son frère par jeu, il n’en va malheureusement pas de même pour Courgette. Les mouvements de caméra, les cadrages créent une véritable angoisse et un surcroît de réel. Alors que Courgette apeuré referme la trappe sur sa mère qui s’apprêtait à le battre, le plan suivant nous montre son cerf-volant qui se détache et s’envole dans le ciel. La violence est suggérée, jamais diminuée ou édulcorée.

La maltraitance infantile

Ainsi la question de la maltraitance infantile est abordée une scène de confidence où Simon raconte à Courgette le sort de leurs petits camarades. Folie, expulsion, meurtre, pédophilie, le film ne fait pas l’impasse sur les mots mais désamorce la violence par un comique assumé qui ne tombe jamais dans le mauvais goût. Le comique de geste subtil qui provoquera le rire chez les enfants et les adultes est la source de la réflexion. On se rend compte que tous les enfants sont frappés par des troubles obsessionnels physiques ou psychologiques découlant des maltraitances qu’ils ont subies. C’est là l’intelligence du film, donner aux enfants les clés pour s’interroger sur une réalité, permettre un moment de partage entre adultes et enfants.

Une Courgette lyonnaise !

Et s’il nous tient autant à cœur à Arlyo de parler de ce très beau film d’animation, c’est parce qu’il est né à Lyon ! C’est à l’école d’art et d’animation 3D Émile Cohl que Claude Barras a étudié et c’est dans les studios de Pôle Pixel à Villeurbanne qu’il a donné vie à Courgette et à ses camarades.

Le film est réalisé avec la technique de l’animation en volume. On film image par image le déplacement des petites statuettes. Pour accomplir ce travail colossal, il a fallu pas moins de 9 animateurs spécialisés travaillant sur 15 plateaux différents. Et comme il aurait été dommage de laisser à l’abandon les créations de Claude Barras et de ses animateurs, le Musée de la Miniature de Lyon prolonge notre plaisir de spectateur en proposant une exposition dédiée au film. Jusqu’au 2 avril 2017, vous pourrez découvrir l’envers du décor du film et parcourir l’histoire de sa conception. 35 marionnettes, 9 décors originaux, les storyboards préparatoires du film… Comme quoi, il n’y a pas d’âge pour aimer les dessins animés.

Laurine Labourier